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.»Aussitôt il les aborde, il leur fait son compliment, et les invite à venirà son hôtellerie manger des macaronis, des perdrix de Lombardie, desoeufs d'esturgeon, et à boire du vin de Montepulciano, du lacryma-christi, du chypre, et du samos.La demoiselle rougit, le théatinaccepta la partie, et la fille le suivit en regardant Candide avec desyeux de surprise et de confusion, qui furent obscurcis de quelqueslarmes.À peine fut-elle entrée dans la chambre de Candide, qu'elle luidit : « Eh quoi ! monsieur Candide ne reconnaît plus Paquette ! » Àces mots, Candide, qui ne l'avait pas considérée jusque-là avecattention, parce qu'il n'était occupé que de Cunégonde, lui dit : «Hélas!ma pauvre enfant, c'est donc vous qui avez mis le docteur Panglossdans le bel état où je l'ai vu ?- Hélas ! monsieur, c'est moi-même, dit Paquette ; je vois que vousêtes instruit de tout.J'ai su les malheurs épouvantables arrivés à toutela maison de madame la baronne et à la belle Cunégonde.Je vous jureque ma destinée n'a guère été moins triste.J'étais fort innocente quandvous m'avez vue.Un cordelier, qui était mon confesseur, me séduisitaisément.Les suites en furent affreuses ; je fus obligée de sortir duchâteau quelque temps après que monsieur le baron vous eut renvoyéà grands coups de pied dans le derrière.Si un fameux médecin n'avaitpas pris pitié de moi, j'étais morte.Je fus quelque temps parreconnaissance la maîtresse de ce médecin.Sa femme, qui étaitjalouse à la rage, me battait tous les jours impitoyablement ; c'était unefurie.Ce médecin était le plus laid de tous les hommes, et moi la plusmalheureuse de toutes les créatures d'être battue continuellement pourun homme que je n'aimais pas.Vous savez, monsieur, combien il estdangereux pour une femme acariâtre d'être l'épouse d'un médecin.Celui-ci, outré des procédés de sa femme, lui donna un jour, pour laguérir d'un petit rhume, une médecine si efficace qu'elle en mourut endeux heures de temps dans des convulsions horribles.Les parents demadame intentèrent à monsieur un procès criminel ; il prit la fuite, etmoi, je fus mise en prison.Mon innocence ne m'aurait pas sauvée si jen'avais été un peu jolie.Le juge m'élargit, à condition qu'il succéderaitau médecin.Je fus bientôt supplantée par une rivale, chassée sansrécompense, et obligée de continuer ce métier abominable qui vousparaît si plaisant à vous autres hommes, et qui n'est pour nous qu'unabîme de misère.J'allai exercer la profession à Venise.Ah ! monsieur,si vous pouviez vous imaginer ce que c'est que d'être obligée de caresser indifféremment un vieux marchand, un avocat, un moine, ungondolier, un abbé ; d'être exposée à toutes les insultes, à toutes lesavanies ; d'être souvent réduite à emprunter une jupe pour aller se lafaire lever par un homme dégoûtant ; d'être volée par l'un de ce qu'ona gagné avec l'autre ; d'être rançonnée par les officiers de justice, et den'avoir en perspective qu'une vieillesse affreuse, un hôpital, et unfumier, vous concluriez que je suis une des plus malheureusescréatures du monde.»Paquette ouvrait ainsi son coeur au bon Candide, dans un cabinet, enprésence de Martin, qui disait à Candide : « Vous voyez que j'ai déjàgagné la moitié de la gageure.»Frère Giroflée était resté dans la salle à manger, et buvait un coup enattendant le dîner.« Mais, dit Candide à Paquette, vous aviez l'air sigai, si content, quand je vous ai rencontrée ; vous chantiez, vouscaressiez le théatin avec une complaisance naturelle ; vous m'avezparu aussi heureuse que vous prétendez être infortunée.- Ah !monsieur, répondit Paquette, c'est encore là une des misères du métier.J'ai été hier volée et battue par un officier, et il faut aujourd'hui que jeparaisse de bonne humeur pour plaire à un moine.»Candide n'en voulut pas davantage ; il avoua que Martin avait raison.On se mit à table avec Paquette et le théatin ; le repas fut assezamusant, et sur la fin on se parla avec quelque confiance.« Mon père,dit Candide au moine, vous me paraissez jouir d'une destinée que toutle monde doit envier ; la fleur de la santé brille sur votre visage, votrephysionomie annonce le bonheur ; vous avez une très jolie fille pourvotre récréation, et vous paraissez très content de votre état de théatin.- Ma foi, monsieur, dit frère Giroflée, je voudrais que tous les théatinsfussent au fond de la mer.J'ai été tenté cent fois de mettre le feu aucouvent, et d'aller me faire turc [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]

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